vendredi 20 juillet 2018

Retour en mer après escale technique au Cap Vert


Le 19 juillet 2018


Bonjour à toutes et à tous,

Le 17/07 fût le départ de Mindélo suite aux anomalies techniques, la déception et la colère sont passées et l’enrouleur de génois est réparé.

C’était un départ très venté, de 25 à 35 nœuds, avec Fanch, nous guettons  la baisse de vent pour défaire les amarres, finalement  un petit bateau de la marina nous a aider à faire les manœuvres de sortie.

Entre les îles, le vent a encore monté et les vagues étaient de la partie, comble de malchance, une écoute de génois se détache et la voile est emmêlée avec la drisse de spi à l’avant.

J’arrive dans la tourmente à démêler le génois mais la drisse du spi était coincée en haut du mât.

Après une heure de calme relatif, je décide de monter au mât, chose que je n’avais jamais fait en pleine mer, Alizés II gîtait, arrivé en haut du mât l’effet de balancier représentait probablement 4 m.

Je m’agrippais de toutes mes forces même si les échelons sont très utiles en pareil cas, j’ai pris une multitudes de coups et je me suis ouvert un orteil.

Je pensais en avoir terminé et bien non, obligé de remonter à mi-hauteur pour retirer la drisse de spi dans les haubans.

Le dur combat a duré 2 heures pour tout remettre en ordre, j’ai filé plein sud sans le faire exprès et Fanch partant ouest s‘est retrouvé dans la pétole étant sous le vent d’une des îles.

Je me suis pris un bon mal de mer à faire le yo-yo en haut du gréement et difficile de se nourrir dans pareil cas. 

Au moment où je vous écris, certaines douleurs sont présentes et je commence à récupérer de ces  violents efforts.

Ce matin comme le montre la vidéo, j’étais sous spi avec une mer calme, le vent était de 9 n et nous avancions à entre 6 et 7 n.

Un vrai délice de voir glisser Alizés II sans bruit, juste son passage dans l’eau qui vient caresser l’étrave.

C’est un moment de bonheur à apprécier, à méditer et  observer les multitudes de poissons volants fuyant la masse d’Alizés II et leurs prédateurs naturels.

Nous trouvons tous les matins plusieurs de ces petits poissons volants échoués sur le bateau, le Navy ne les aime pas et il n’apprécie même pas les dorades coryphènes.

J’ai souvent 2 lignes de traîne et la pêche se résume pour l’instant à des dorades coryphènes  de 3 à 4 kg, en dégustation crue, en sashimi avec soja c’est excellent.

Tout va bien à bord, j’étudie de près la météo jusqu’au Pot-au-Noir afin de le négocier au mieux, c’est une zone de convergence entre hémisphère Nord et Sud, il y a peu de vent, des orages  et nous pouvons y rester plusieurs jours.

Par ailleurs, il faut aussi anticiper l’anticyclone de St Hélène, c’est pour cela qu’avec mon ami Fanch nous préférons nous rapprocher du Brésil.

A très bientôt pour de nouvelles aventures

Francis et Navy   

mardi 17 juillet 2018

Escale technique à Mindélo au Cap Vert


Mindélo le 17 juillet 2018 à la position 16 53 08 N et 24 59 31 W

Bonjour à toutes et à tous,

Je vous écris du Cap Vert à la suite d’un incident technique survenu le 11 juillet, jour de la découverte d’un jeu anormal entre des tubes de l’enrouleur du génois (voile d’avant), ensemble entièrement révisé à Hendaye.


Le 12 juillet je décide de faire un arrêt forcé à Mindélo pour réparer l’incident et mon ami Fanch prend l’initiative de me suivre par solidarité.


Le 13 juillet, avec mon Fanch nous démontons tout l’enrouleur, sous un vent permanent de 15 à 35 nds et une houle très présente, donc des manutentions forcément délicates avec des pontons flottants ou on a du mal à rester en équilibre.

Enrouleur de génois déposé sur le ponton 
Nous découvrons avec stupeur un mauvais montage entre les tubes et la colère est à la hauteur de ce problème.


L’équipe technique de la marina de Mindélo a pris en charge la réfection de l’enrouleur et le 15 juillet nous avons remonté tout l’enrouleur avec beaucoup de peine à aligner le gréement et en fin de soirée tout était en place.
Vue du haut du mât lors de la remontée de l'enrouleur 
Autre vue du mât
Vue en hauteur de Mindélo
Cela restera une date mémorable avec la France championne du monde de football.

J’ai aussi dépensé de l’énergie en m’expliquant avec la personne responsable et finalement nous avons convenu d’un prise en charge financière et l’histoire devrait bien se terminer.

Nous devions partir le 16 juillet et malheureusement la malchance s’acharne un peu, cette fois c’est le bateau de Fanch qui a un problème, la pale immergée du régulateur d’allure vient toucher le safran.

En fait, il y a eu contact sur le tube horizontal du régulateur d’allure avec le ponton et le RA avait glissé et reculé dans le passage sur la jupe AR.

Le 16 juillet, nous avons refait une stratification sur ce tube et la jupe et revu l’alignement du RA, tout est fonctionnel.

Concernant Alizés II, j’avais aussi un autre problème au niveau d’une rouille généralisée sur tous les câbles inox remplacés avant mon départ, à priori ce n’est une anomalie mineure et cela ne met pas en question la sécurité, mais j’ai demandé au fournisseur de m’attester que ces câbles sont conforme au cahier des charge du bateau.

Après toutes ces péripéties, nous sommes prêts, nous partons le 17 juillet de Mindélo, la météo nous donne du vent convenable pendant 2 jours et après c’est plutôt calme, notre cap avec Fanch est une direction vers l’île de Fernando de Noronha au Brésil de manière à négocier au mieux le Pot-au-Noir.

Navy va très bien, il a fait quelque visite sur le bateau à Fanch, il est aussi en osmose avec Alizés II, il vous envoie plein de lêchouilles.
Il est beau ce bateau 

Autre sujet, j’ai mis un nouveau lien dans le blog concernant le tracking (suivi du bateau) en effet, il permet d’avoir une position toutes les 4h d’Alizés II avec la météo sous Google map. 

Je vous embrasse à toutes et à tous et n'oubliez pas les dons pour la ligue contre le cancer 

Francis et Navy

mardi 10 juillet 2018

Article sur l’organisation de notre vie à bord







Depuis notre départ le 23 juin du Crouesty, je n’avais pas l’envie d’écrire ou de filmer, juste d’évoquer des motivations lointaines.

La fatigue est passée et j'ai trouvé cette osmose entre le marin, le bateau et les éléments.

Dans les calmes avant les Canaries, j'ai passé beaucoup de temps à mettre au point mon régulateur d'allure. 

Par ailleurs, cette descente dans le grand Sud passe par un parcours déjà fait 3 fois, dans le cadre de missions solidaires pour Voiles Sans Frontières jusqu'au Sénégal, j’ai l’impression de revivre du déjà vu.

Le vent a été faible les premiers jours puis il est bien établi  depuis la traversée des Canaries, les vagues de travers chahutent  Alizés II, cela permet de revoir les choses mal fixées,
Hier soir une vague plus forte que la moyenne nous a couché un peu trop, Navy sur l’escalier de descente a tenté de sauter, il a atterri sur mon pied en y laissant une bonne trace de griffe, une équipée mal fermée a favorisé la projection de purée en poudre, de vermicelles, de  diverses choses  et  j’avais les pieds recouvert de tout ce capharnaüm mélangé au sang de la griffure du chat.

Bien entendu un gros nettoyage s’en est suivi.

Pour l’instant, la grand voile n’est pas opérationnelle à cause de coulisseaux cassés, je les changerai dans des conditions plus calmes et nous sommes sous génois, voile d’avant, réduite au-delà de 18 nds de vent.

Même si les vagues perturbent notre vie à bord, je suis heureux d’observer Alizés II filer en ce moment à une vitesse moyenne de 6 nds et nous arrivons à faire des journées de 150 mn soit 280 km.   

Nous nous dirigeons vers la partie ouest du Cap Vert en évitant un passage entre les îles, en effet, nous l’avons encore vécu aux Canaries, on se retrouve avec un phénomène de venturi, vent de plus de 35 nds puis un manque de vent en se retrouvant sous l’une des îles.

Nous sommes maintenant en mode navigation avec Navy, chacun a ses petites habitudes, Monsieur le chat a monopolisé son territoire, tout le carré(pièce principale du bateau) si trouve la tanière de l’arbre à chat, refuge quand ça remue de trop, un choix de banquettes en fonction de la  gîte, de l’ombre ou du soleil, bénéficiant d’un filet de protection et une la table au milieu de son univers lui permettant de se restaurer à sa guise.

Le soir, il aime se réfugier sous la capote, observer les éléments comme son maître. 
Et que reste -il au skipper? Sa table à carte, endroit ou je vous écris avec tous les instruments de navigation et de communication, le dessus du frigo me servant de table et je mange debout la plupart du temps, mon dortoir dans la cabine arrière gauche (babord) lit de 90 cm de large entouré de casiers et caisses de matériel et outillage sans oublier le compacteur de déchets.

Ce cher Navy particulièrement choyé partage mon lit très souvent lors de mes courts sommeils, donc pour certaines personnes inquiètes des conditions de vie avant son  départ, il n’a pas  vraiment à se plaindre même si le voyage est imposé.

Petite anecdote avec la boule de poils, il y a 3 jours, je bricolais dans un coffre arrière mon régulateur d’allure et soudain plus de chat dans le champ de vision.

Aucune réponse à mes appels, j’ai cru qu’il avait fait une chute dans l’eau, j’ai fait demi tour sur 3 kilomètre et j’ai aperçu mon cher compagnon sortir du coffre ou je travaillais, je ne  l’avait pas vu y descendre.
C’est une attention de tous les instants, il paraît prudent et ne s’aventure pas sur le pont mais il suffit qu’un insecte se manifeste, qu’un oiseau nous survole et là, la sécurité n’est plus de mise et il ne contrôle rien avec ses instincts de chasseur.

Nous filons sous le vent, Alizés II glisse avec enchantement, la vie est belle hormis d’avoir laissé nos proches pendant de longs mois.

N’oubliez pas que le meilleur témoignage à me faire sont vos dons pour la Ligue contre le cancer via mon blog: 
https://francislongueroute2018.blogspot.fr,


A très bientôt

Francis et Navy  

mardi 3 juillet 2018

L’origine de mes motivations


J’ai prévu de raconter régulièrement mes ressentis et quelques événements à bord  avec Navy.
Tout cela sera agrémenté de photos et vidéos tant que la technique le permettra.

Nous avons déjà 10 jours de navigation, le suis en dessous de la parallèle à Rabat au Maroc  au moment je vous écris.

Je commence à entrer dans cette osmose de l’homme, du bateau et des éléments, j’ai eu une grande fatigue les premiers jours ou Alizés II c’est retrouvé à la cap par deux fois faute de réaction du marin et Navy ne m’a pas réveillé.

Étrangement le vent a sérieusement manqué depuis le début de cette navigation et j’espère toucher du vent plus important dans les prochaines heures pour rejoindre les Canaries.

C’est tellement bon de voir filer Alizés II avec juste le vent nécessaire sans entendre une quelconque plainte.

Quelle chance de se laisser bercer de la sorte et avant de vous faire des reportages sur Alizés II et sur  son équipage je tenais à vous exprimer des motivations profondes avec un début d’histoire qui a pris racine à la petite enfance.                     

Mon histoire

C’est une aventure hors normes et probablement la plus intense de ma vie que je viens de commencer depuis le 23 juin 2018.

Le cancer est l’élément déclencheur de ce périple, j’avais besoin de motivations au début de mon traitement début 2017 pour prétendre à la rémission de cette maladie et j’ai eu la chance d’être bien entouré par mes enfants et ma compagne.
La rémission est reconnue depuis le mois d’août 2017 
Cependant, des origines plus spirituelles sont aussi des vecteurs provenant de la petite enfance.
Cette enfance fût perturbante et très riche en  valeurs  transmises par ma mère.
Je dédie la Longue Route 2018 à la recherche contre le cancer  et je le dédie avec amour  à ma maman décédée en 1992 de cette terrible maladie comme ce fût le cas de ma sœur récemment. 
La vie de cette maman  est loin d’être ordinaire, elle est devenue veuve avec 2 enfants 1 an avant ma naissance, étant habituée  aux travaux de la ferme elle a trouvé un travail similaire dans une autre ferme tenu par celui qui sera mon père.
Elle est tombée enceinte, sa grossesse  est passée inaperçue, je suis né à Bordeaux en 1957, mon frère et ma sœur  n’ont pas eu connaissance de mon arrivée pendant des années et j’ai été placé en sortie de maternité dans différentes familles.
A l’age de 7 ans, maman décide de me récupérer, elle travaillait encore chez mon père, je fais la connaissance de cet homme et je ne saurais jamais de son vivant qu’il était mon père et il n’a rien fait pour me reconnaître.
La situation était pour le moins délicate, il était marié sans enfant et nous avons vécu sous le même toit pendant 7 mois.
Je n’ai jamais entendu une parole de sa femme, elle organisait les repas partagés par tous les quatre, son mutisme s’expliquait  par ma présence, je représentais probablement une grande terreur et  mon père lui infligeait l’inacceptable.
Je trouvais refuge avec la seule chienne de la ferme appelée Diane, j’allais me confier avec le peu de mots de mon vocabulaire de l’époque, finalement il n’était  pas nécessaire de s’exprimer par la voix avec elle, elle comprenait à travers le regard et les gestes de tendresse.
Rare sont les humains à comprendre ce langage. 
Après 7 mois de cette cohabitation tendue, nous avons pris refuge avec ma mère dans une maison indépendante.
Le  2 février 1965, jour pluvieux et froid, nous voyons  passer un cortège funéraire devant les fenêtres,  ma mère m’apprend que la personne allant de son domicile à l’église était mon père  et n’y a jamais plus eu de commentaire sur lui pendant  les 27 années restantes de l’existence de ma mère.
Pour en venir aux valeurs, ma chère maman elle n’était pas une championne de la communication et  était douée  pour esquiver les situations difficiles.
Pas étonnant si son cher fils a récupéré un peu de ce mauvais côté, néanmoins, elle était d’un courage extraordinaire, d’une résistance hors normes, elle a toujours été exploitée sans jamais se plaindre, elle paraissait indestructible ouverte à tous sans jamais juger ni critiquer.



Le peu d’argent qu’elle recevait de son dur labeur arrivait à nous loger et à nous nourrir.

Une scène me revient très souvent à l’esprit, j’ai 7 ans, le suis admiratif un jeudi sans école, au pied d’un rang de vigne à voir  ma mère diriger une charrue tirée par un cheval de trait.

Cette image est le symbole d’un dur labeur, d’un travail de la terre et du soin qu’on lui doit, du courage et d’une très honorable simplicité.

Elle a su me communiquer les valeurs du travail avec un certain état d’esprit m’ayant permis de réussir professionnellement.

Par contre, elle n’a pas pu jouir de son indépendance, des découvertes du monde, je le fais aussi pour elle et  elle aurait eu plaisir à lire mes récits      

C’est donc un honneur de porter certaines de tes valeurs maman, tu m’observes depuis  de très haut ou de très bas et je prends l’engagement de mener cette mission pour toi, la recherche contre le  cancer et mes proches.   

Je remercie tout particulièrement Magali, compagne de Fanch d’avoir réalisé ce croquis à ma demande, je suis profondément touché de cette réalisation.